Une fois installés dans la maison d’Izieu, les enfants retrouvent une vie plus paisible, grâce au dévouement sans faille du personnel de la colonie, et à l’aide des gens de la région. La vie campagnarde atténue les souffrances endurées dans les camp. Les enfants vont connaître neuf mois de répits de juin 1943 à avril 1944.

L’atmosphère de l’été est particulièrement détendue. Ce sont les vacances. Paulette et les enfants en profitent : « Les gosses jouaient. C’étaient des jeux, un jeu perpétuel. Les gosses … On étaient d’ailleurs tous extrêmement à l’aise. On n’avait pas peur, on n’avait rien, on était très à l’aise ».
Paulette Pallarés est chargée d’endormir les enfants : « Et chaque soir, je passais d’une paillasse sur l’autre raconter une histoire parce que, les garçons, il fallait leur raconter une histoire à chacun, pas forcément la même. Et là, sous cette fenêtre, il y avait Emile. Et je finissais ma tournée par là parce que, Emile, il fallait l’endormir. C’était un petit blond avec des yeux très bleus, avec toujours des vêtements bleus. Il était mignon, adorable ; mais alors, il était traumatisé parce qu’il avait vu arrêter ses parents. »
Tous les matins, Paulette veille au respect de cette tâche quotidienne : « Ils attrapaient leur petite cuvette, ils venaient prendre de l’eau dans le bassin, ils se lavaient. Il y avait deux petits qui avaient été rasés à cause des poux, il y en avait un brun et un blond. Un jour, ils sont venus vers moi et ils m’ont dit : « Madame Paulette, qui c’est qui a les cheveux les plus longs ? » J’ai dit : « C’est Marcel ». Marcel c’était le brun. Et l’autre m’a dit : « Oh c’est pas vrai, parce que moi, je les arrose tous les matins ! »
La maison d’Izieu apparaît comme une île indolente, à l’écart de la tempête. L’employé l’O.S.E qui occupe le poste de cuisinier en témoigne : « En été, nous avons fait les foins avec les jeunes. Nous allions voir nos voisins. La famille Perticoz a été importante pour nous. A l’époque, on vivait finalement à Izieu comme dans une colonie ordinaire. L’atmosphère était gaie, agréable. »
Juliette Perticoz, la belle fille Eusèbe Perticoz (le voisin de la maison), se souvient des enfants. « Les enfants allaient se promener. On en avait souvent qui passaient à la maison. Quand on allait traire les vaches ils venaient regarder. La docteresse, la sœur de Léon Reifman, était souvent chez nous, avec son fils. Les enfants étaient heureux à la ferme, ils venaient voir les poules et les lapins. »
Tout le monde est présent ce 24 décembre 1943. Pierre-Marcel Wiltzer passe dans une pâtisserie de Belley, avant de se rendre à la colonie, en compagnie de Marie-Antoinette Cojean. Le sous-préfet et la secrétaire en chef arrivent à Izieu les bras chargés de cadeaux et de gâteries. Volontairement, M.Wiltzer s’est déplacé en tenue officielle, pour amuser les enfants. L’ambiance est très animée. M.Wiltzer se souvient de chansons, notamment de « Vous n’aurez pas l’Alsace et la Lorraine » ce qui va droit au cœur de ce natif de Sarreguemines.
Julien Favet, employé des Perticoz, a les faveurs de certains enfants qui lui apportent son casse croûte quand il travaille aux champs.
